l'oranger amer
Pour le diplôme de l’École Européenne d’Herboristerie de Bruxelles, il fallait rédiger un mémoire, qui fut sur L’ORANGER AMER… J’avais imaginé un jour en faire un livre… mais le temps a passé et vous aurez ici en quelques pages le résumé de ce document qui dans sa version d’origine comptait 280 pages…
Ce mémoire s’appelait « L’ORANGER AMER : l’amertume de l’or ou l’or de l‘amertume » hommage à l’opérativité…

Photo Simone Sarah Chabert - Citrus aurantium amara
ORANGER AMER - Citrus aurantium amara
L’oranger amer est du clan des citrus et de la famille des rutacées
LE NOM
Connu aussi sous le nom de Bigaradier, bigarade, oranger à petits grains : à cause de la petitesse de ses fruits, qui sont comme des grains… Le nom de bigaradier lui a été donné car les grains sont matures à des moments différents ce qui donne une multitude de couleur sur l’arbre, du blanc des fleurs aux dégradés de vert allant jusqu’à la couleur orange du fruit mature en passant par toutes les couleurs intermédiaires. On trouve aussi cette terminologie chez les cerises comme le bigarreau (Cerise légèrement amère)
Son nom latin vient de Citrus dont le premier et plus ancien est de cédratier : Citrus medica, aujourd’hui Citrus est plutôt associé au citron.
Aurantium vient aussi du latin aurantium ou auratium qui veut dire d’or, tout comme amara : amer.
Dans d’autres langues :
- Anglais : Bitter orange or Sour orange
- Allemand : Bitterer Orangenbaum
- Espagnol : Naranjo amargo
- Italien : arancio amaro
- Japonais :
ORIGINES
On pense qu’il est probablement originaire de l’est de l’Inde et de la Chine, à savoir qu’il est spontané en Himalaya. On a des traces de sa culture dès le II è siècle APJC en Chine.
Connu des égyptiens mais sans datation précise, il arrive en Sicile au XI è, pour autant les marchands arabes l’introduisent en Espagne du sud vers l’an 1000 en apportant aussi les techniques de distillation d’huiles essentielles.
Aujourd’hui on le trouve dans le sud de France, en Côte d’Ivoire, au Brésil comme au Paraguay (nous y reviendrons dans les huiles essentielles). On trouve différentes variétés : le « communis » ou commun que l’on trouve sur la côte méditerranéenne ; le « Séville » qui est en fait la variété de référence en Espagne ; sur le pays niçois on trouve le bouquetier de Nice, prisé pour ses coulanes (écorces) ; il y a aussi les myrtifolia et macrophylla que l’on trouve plus en Asie.
Comme vous le voyez, le bigaradier présente une ramification très nombreuse de vraies variétés, et très peu de sous variétés. Il existe des hybrides : mélange entre oranger amer et doux.
La particularité de C. aurantium amara est qu’il sert de porte greffe a tous les autres citrus.
In traité du citrus par Georges Gallesio - c% Louis Fantin à Paris 1811
Photo Simone Sarah Chabert - Citrus amara myrtifolia
DESCRIPTION
C’est un arbuste épineux le plus souvent, au feuillage toujours vert, il est dense en forme de flamme avec une cime conique, et peut atteindre 15 mètres sans être taillé. La taille facilitant les récoltes, les arbres de productions sont limités entre 5 et 8 m de haut maximum.
Le tronc est gris, lisse, droit très ramifié pour former le houppier.
Les feuilles semblent persistantes (les anciennes tombant après le développement des nouvelles) sont brillantes sur le dessus, elles sont légèrement parfumées et ont des épines aux aisselles pour les feuilles basses. Elles sont de forme ovales, alternes, le limbe est ponctué de poche à essence. Le pétiole est garni de deux ailes plus prononcées que sur l’oranger doux.
Les fleurs très parfumées ont 5 pétales blanc et charnus, 20 étamines soudées à la base. Groupées à l’aisselle des feuilles, la floraison est longue et s’étale sur plusieurs mois. Les pétales contiennent comme les feuilles des glandes à essence et le pétiole est crénelé alors que celui de l’oranger doux est lisse et cylindrique. Les fleurs sont appréciées pas les abeilles car très mellifères.
Le fruit est une baie cortiquée appelée agrume. Agrume vient du latin acrumen : aigre, à cause de l’acidité. On appelle aussi les agrumes : les hespéridés à cause du « jardin des Hespérides ». Il est de couleur orange a pleine maturité. Certaines espèces donnent des fruits bosselés un peu comme le Combava. L’épicarpe -jaune ou orange- constitue le zeste ou écorce du fruit, il contient de nombreuses poches à essences (poches shizolysigènes). L’endocarpe lui est divisé en quartiers remplis d’une pulpe juteuse.
Les graines appelées pépins, situés dans les quartiers, sont souvent plus de vingt par fruits.
Photo Simone Sarah Chabert - Citrus aurantium amara
CULTURE
On le cultive en pleine terre, dans les climats tempérés chauds et sec, il déteste le vent et la stagnation d’humidité. Il est peu exigeant au niveau du sol, a une croissance rapide, sa plantation se fait au printemps soit par semi de graines, soit par greffon. Certaines espèces peuvent supporter -15° (sans vent ni humidité). La culture en bac est possible c’est ainsi qu’il est arrivé auprès de Louis XIV à l’orangerie de Versailles.
RÉCOLTE
En Provence on récoltait les fleurs de fin avril à mi-mai. Un arbre produit jusqu’à 6-8 kg, certain jusqu’à 25 -30 kg. Les boutons floraux se récoltent tôt le matin après la rosée, on les déposait sur un drap sous les bigaradiers. Séchés sur la journée ils étaient ensuite apportés en distillation à Grasse sur des charrettes la nuit. (sic Coulanes).
Les feuilles sont ramassées de juin à septembre, les fruits d’octobre à fin novembre voire début décembre pour distillation. Les zestes sont prélevés sur les fruits en voie de formation à l’aide d’un couteau pour être séchés à plat, le plus souvent ils servent à faire des liqueurs.
Nous reviendrons sur ces aspects dans la partie Huiles Essentielles.
PHYTOTHÉRAPIE
Le Citrus aurantium est traditionnellement utilisé pour aider à la relaxation. Il joue un rôle favorable sur l’amincissement car il permet d’augmenter la thermogenèse corporelle facilitant ainsi le déstockage et la combustion des graisses.
Les principes amers des zestes du bigaradier stimulent l’appétit, en cas d’inappétence.
L’hyperpigmentation provoquée par l’application de certaines Rutacées et Apiacées riches en furanocoumarines a été mise à profit par les Egyptiens, la médecine ayurvédique et Dioscoride pour traiter le psoriasis, le vitiligo et d’autres affections dermatologiques. Cette technique n’est pas recommandée aujourd’hui car l’exposition au soleil, augmente le risque de cancer de la peau.
Photo Simone Sarah Chabert - Citrus aurantium amara
La feuille du bigaradier est très souvent utilisée pour ses propriétés sédatives, car elle calme les spasmes des nerveux et permet de trouver le sommeil. Elle est aussi recommandée contre les toux quinteuses, les crampes d’estomac d’origine nerveuse, les palpitations, la céphalalgie et accessoirement comme fébrifuge ou sudorifique en cas de rhume.
Bien que la feuille et la fleur d’oranger doux jouissent à peu près des mêmes propriétés, l’herboristerie utilise surtout celle du bigaradier, bien supérieure comme arôme et comme goût.
Les fleurs sont comme les feuilles, utilisées pour leurs propriétés sédatives, elles sont antispasmodiques, calmantes, hypnotiques et apéritives…
La fleur est toutefois plutôt réservée pour la préparation de l’hydrolat pharmaceutique extrêmement connu : l’eau de fleur d’oranger, appelée encore eau de Naphé, très parfumée, utilisée dans l’alimentation et en pharmacie et qui jouit elle aussi de propriétés calmantes. On extrait aussi de ces fleurs l’huile de Néroli, qui est la base des eaux de Cologne de haute qualité.
in Larousse des plantes qui guérissent – Edition 1974
Seule l’écorce d’orange amère est utilisée en médecine : elle sert à faire des sirops, une teinture, des alcoolats. Très bon stomachique, c’est en même temps qu’un apéritif, un excellent tonique de l’estomac et des voies digestives. L’orange douce, beaucoup moins amère, n’a pas une action aussi marquée. On retire des fruits tout jeunes du bigaradier qui tombent spontanément, nommé orangette ou Petit Grain une huile volatile qui porte leurs noms. Les orangettes deviennent très dures en séchant et servaient autrefois à faire des pois à cautères dits « pois d’Oranges ».
in Coulanes – Roselyne Ferrando – édition à compte d’auteur.
Photo Simone Sarah Chabert - Citrus aurantium amara
USAGE INTERNE
En tisane : infusion pendant 5 minutes d’une cuillerée à café de fleurs par tasse d’eau chaude. Filtrez aromatisez avec du miel, en boire 3 tasses par jour ou une tasse de tisane de fleurs avant le coucher pour favoriser le calme, la détente, le sommeil…
Infusion : 20 g de feuilles ou de fleurs par litre d’eau. Laisser infuser 10 minutes. Prendre 2 à 3 tasses par jour dont une, le soir au coucher. On peut parfumer et accentuer l’effet avec quelques gouttes d’eau de fleur d’oranger.
Décoction : concentrée de feuilles (120g à 150 g de feuilles par litre) Elle était jadis utilisée dans les graves perturbations nerveuses et même contre l’épilepsie.
Sirop d’écorce d’orange amère : stomachique et tonique, il se prépare avec 100g des zestes sec coupé en morceaux que l’on laisse macérer 12h avec 100g d’alcool à 60°. Passer et ajouter un sirop préparé avec 350 g de sucre dans un litre d’eau.
Vin tonique et apéritif : laisser macérer 100g des zestes d’orange amère (ou douce) dans un litre de vin blanc avec quelques fleurs de camomille.
USAGE EXTERNE
L’infusion de fleurs et feuilles d’oranger : est un excellent calmant de la peau, qu’elle adoucit à merveille, en application de compresses.
Contre les talalgies (ou douleur du talon) qui surviennent souvent chez les alités ou les opérés, il est recommandé de couper une orange en deux au moment de la crise, de vider chaque moitié de son contenu et d’y emboîter les talons douloureux (Drs Guignard et Tronchon).
EN PLUS
Psychologie
Le Docteur Bernard Vial, en brosse un portrait aigre comme son goût : « Un certain manque de cohérence dans sa tentative de récupération du pouvoir. Car il a cessé de croire en lui lorsque les autres ont cessé de lui prouver leur gratitude.
Sentiment d’absurdité de son œuvre, déception de ne pas être reconnu à la mesure de ses mérites ».
Voir bibliographie
in Dictionnaire affectif des plantes – Dr Bernard Vial –– auto édition
Symbolique
Connu bien avant l’oranger doux, il a acquis ses lettres de noblesse autour de la pureté, de l’innocence, de la fraîcheur, de la fertilité. De fait, il parle d’innocence et de joie. C’est la raison pour laquelle ses fleurs étaient précieusement rassemblée en couronne posée sur les têtes des mariées, comme parure nuptiale.
Du mot paradesha, signifiant « jardin clos » dans la Perse antique, est né le nom de paradis. Cet espace de rêverie, de repos ou de rencontres, organisé autour d’un bassin ou d’une fontaine, était présent dans chaque demeure noble capable d’en assurer l’entretien coûteux. Savamment orné de massifs chatoyants, le jardin persan, se remarquait surtout pour la variété de ses fleurs aux parfums enivrants, capables de faire tourner la tête, au plus endurci des visiteurs. Aux senteurs de roses, de lis et d’oranger, se mêlaient les effluves subtils des fleurs de jasmin, ouvrant leur cœur délicat aux derniers rayons de soleil
in L’esprit des fleurs ‘mythes, légendes et croyances’ - Hélène Dubois-Aubin – préface de J.M. Pelt
Une variété de Bigaradier cultivée aux Barbades et à Curaçao, dont le fruit reste toujours vert, produit une écorce qui sert à préparer le curaçao des îles ou curaçao de Hollande. Le fruit, confit à l’eau-de-vie sucrée, est connu sous le nom de « chinois ».
in Larousse des plantes qui guérissent – Edition 1974